A deux heures de train au nord de Lisbonne, la côte d’Aveiro est un des joyaux de la péninsule ibérique. Mais la “Venise du Portugal” est menacée de disparaître par la montée des eaux et le délabrement. Enquête.
Le ton est donné avant même d’arriver à Aveiro. Avant d’entrer en gare, le train longe des champs inondés et des routes défoncées. Si la ville connaît chaque année d’importantes canadian pharmacy oxycodone inondations, les orages des mois derniers ont provoqué une montée des eaux sans précédent. Dans le journal local, Diario de Aveiro, un éditorialiste prévoit d’ailleurs de très mauvaises récoltes pour l’année, et des conséquences néfastes pour le tourisme.
Comme Venise, Aveiro se situe en plein cœur d’une zone marécageuse, à proximité d’un des plus grands lagons d’Europe. Un endroit exceptionnel, qui attire des dizaines de milliers de touristes chaque année.
Pourtant, Aveiro vit une lente agonie. Dans l’indifférence générale, les vagues grignottent chaque année un peu plus l’étroite bande de terre qui sépare le lagon de la mer. Le patrimoine architectural de la ville est lui aussi menacé : faute d’argent et de politiques efficaces, les maisons sont mal rénovées et certaines menacent même de s’effondrer.
Un lagon bientôt englouti ?
Sur le campus de l’université, juste à côté des anciens bassins d’extraction de sel de la ville, voici Fátima Alves, la cinquantaine pétillante, petite brune aux lunettes sévères. Depuis bientôt dix ans, cette chercheuse spécialisée en sciences de l’environnement, qui a fait une partie de ses études à Tours, tire la sonnette d’alarme. « Les problèmes que connaît aujourd’hui la région sont ignorés de tous », déplore-t-elle, dans un français impeccable.
Abritant un écosystème exceptionnel où trouvent refuge de nombreuses espèces endémiques d’oiseaux et de poissons, le lagon ne bénéficie d’aucune reconnaissance nationale ni internationale [1]. Il s’agit pourtant d’un territoire extrêmement vulnérable.
Photographies à l’appui, Fátima Alves montre les conséquences de la montée du niveau de la mer sur l’équilibre naturel de la région. Chaque année, les côtes reculent de près d’une dizaine de mètres, alors même que des centaines de milliers d’euros sont dépensés pour construire des digues. La mer risque d’engloutir le lagon d’ici une dizaine d’années…
En cause, le réchauffement climatique. Les tempêtes et les orages deviennent de plus en plus récurrents, provoquant des inondations à répétition et contribuant à l’accélération de l’érosion des plages. « Avec une telle fréquence, l’agglomération d’Aveiro n’a ni l’argent ni la capacité technique d’intervenir », explique Fátima Alves.
Le problème vient aussi des municipalités et de la mauvaise gestion administrative. Une enquête
réalisée par les chercheurs de l’université d’Aveiro montre que les villes de la région continuent d’accorder des permis de construire dans des zones sensibles. Avec chaque nouvelle construction, les sols sont creusés et retournés, accélérant l’érosion et l’infiltration souterraine des eaux. « Si les maires se comportent de manière aussi peu responsable, c’est que la protection du littoral n’entre pas dans leur champ de compétences », analyse Fátima Alves. En effet, les financements viennent tous de Lisbonne et les municipalités se préoccupent uniquement du développement économique de leurs territoires.
Mais c’est justement l’attrait touristique de la région qui est menacé. Si le lagon disparaît, des dizaines d’hôtels et de maisons situés en bord de mer se retrouveront engloutis et, avec eux, toutes les plages environnantes.
« Il est urgent d’intervenir ! », lance Fátima Alves, avec colère. Malgré la crise et la diminution des financements publics, la chercheuse est persuadée qu’il existe des solutions à la fois efficaces et peu onéreuses. Avec ses collègues de l’université, elle a soumis à la municipalité plusieurs projets. Parmi les recommandations, l’aménagement de “zones tampons” viagra generic le long des côtes, recréant des zones marécageuses pour absorber l’eau lors des crues et des tempêtes.
Un patrimoine architectural en danger
Avec le lagon, c’est aussi le patrimoine architectural de la ville d’Aveiro qui attire les touristes du monde entier. Ils viennent admirer les vieilles maisons de pêcheurs recouvertes d’azulejos multicolores et les édifices de style Art Nouveau qui bordent les canaux de la ville.
Alice Tavares, architecte order generic viagra à l’université d’Aveiro et membre de l’Association portugaise pour la réhabilitation urbaine et la protection du patrimoine [2], nous accompagne pour une visite guidée de la ville.
« La plupart des touristes ne voient pas que de nombreux bâtiments de la ville risquent de s’effondrer », explique dans la voiture cette jolie brune d’une trentaine d’années. En effet, les signes sont peu visibles : peinture écaillée, murs recouverts de lichens, micro-fissures… On pourrait y voir simplement les effets du temps.
Mais le patrimoine architectural est bel et bien menacé. Nous cheap generic viagra commençons la visite par la Ria de Aveiro, le principal canal de la ville. Alice attire notre attention vers un bâtiment beige, au bord de l’eau. Cet hôtel datant du XIXe siècle est légèrement penché sur le côté, la faute aux pilotis utilisés pour sa construction, nous explique Alice, dont le bois est
rongé par l’eau salée qui s’infiltre dans le sol boueux.
S’il ne s’agit pas du seul édifice d’Aveiro à se prendre pour la tour de Pise, la dégradation des bâtiments anciens n’est pas toujours aussi facile à observer. Alice nous emmène dans les petites ruelles adjacentes, qui abritaient autrefois de nombreuses maisons de pêcheurs. Sur la façade de certaines, la peinture est très abîmée. « Les crues récentes ont provoqué des inondations dans les sous-sols de nombreuses habitations. L’eau a infiltré les murs et dissout la peinture », raconte Alice.
Au delà des phénomènes naturels, la plupart des problèmes sont en fait provoqués par les propriétaires eux-mêmes. Pour rénover leurs maisons, les habitants d’Aveiro utilisent des matériaux modernes, souvent moins chers, mais complètement inadaptés aux milieux humides. « À proximité des canaux, le taux d’humidité est très élevé, il est important de laisser les bâtiments respirer », insiste http://viagraonline-storerx.com/ Alice. Un concept que les anciens comprenaient très bien, puisqu’ils utilisaient essentiellement des briques en terre crue et avaient développé http://cialisonline-rxstore.com/ des systèmes d’aération efficaces. À l’inverse, le béton empêchant l’humidité de s’échapper des bâtiments, les murs finissent par être rongés.
Nous nous arrêtons devant une maison, au coin du canal de São Roque. Avec sa clé de voiture, Alice commence à gratter le mur, qui s’effrite comme un château de sable. En posant la main, on s’aperçoit qu’il est imbibé d’eau. De l’autre côté, le mur est recouvert d’une plaque de béton peinte en bleue, complètement gondolée. En dessous, les briques en terre crue d’origine sont recouvertes de lichen. « Ce bâtiment est condamné à s’effondrer », soupire Alice. Comme beaucoup d’autres à Aveiro.
Diaporama des principales dégradations observées à travers la ville :
Tout n’est pas perdu : Alice nous assure que les mentalités commencent à évoluer. Les propriétaires prennent conscience des problèmes d’humidité. Mais crise économique oblige, beaucoup laissent leurs maisons à l’abandon. Si la municipalité a racheté certains bâtiments, les amoureux du patrimoine réclament encore un plan d’action complet, réunissant autorités locales et propriétaires. La facture risque d’être salée.
Clément BONNEROT, à Aveiro
[1] En raison de quantités infimes de mercure dans le lagon, la région n’est pas protégée par la Convention de Ramsar, signée en 1971. Il s’agit d’un traité intergouvernemental qui a pour objectif de promouvoir l’importance des zones marécageuses pour l’écosystème de la planète. Plus de 2 000 sites sont actuellement protégés et bénéficient d’aides internationales financières et matérielles.
[2] Associação Portuguesa para a Reabilitação Urbana e Proteção do Património (APRUPP)