De nombreux diplômés portugais font le choix de lancer un projet agricole. Parmi eux, Luis cultive des herbes aromatiques près de Porto.
Quand il présente
sa
ferme nichée à quelques kilomètres de Porto, Luis n’est pas peu fier. Dans son grand imper blanc, il livre : « Vous savez, contrairement à de nombreux agriculteurs qui ont des héritages dans ce secteur d’activité, moi, je suis parti de rien. Seulement avec une aide de l’Union européenne pour lancer le projet. Aujourd’hui, mon entreprise a un chiffre d’affaires de
325.000€ par an. » Si Luis fait figure d’exception dans ce secteur d’activité, c’est aussi parce que ce grand brun aux traits arrondis et au regard noir est un agriculteur du XXIe siècle.
En tant qu’agriculteur moderne, il a choisi un secteur en plein boom : celui des tisanes biologiques. « Dans la société, il y a un refus grandissant des dérives du monde dans lequel nous vivons. Aujourd’hui, les gens sont de plus en plus sensibles au bio, c’est un créneau porteur ». Mais Luis n’est pas qu’un entrepreneur rationnel, c’est aussi un homme sensible à la nature : « Le propre de l’agriculteur est d’être à l’écoute de son environnement. Moi, dès que je prends une fleur ou une poignée d’herbes dans un bocal de tisane, j’ai l’impression
de renaître », confie-t-il à mi-voix.
Agriculteur du XXIe siècle
Luis sait aussi maîtriser sa communication, c’est d’ailleurs grâce à cela qu’il a pu monter sa ferme biologique. Il a par exemple utilisé les réseaux sociaux pour se positionner comme leader un mouvement d’agriculteurs biologiques modernes. Il est aussi passé par plusieurs plateaux TV et il a même eu sa chronique en prime time. Son entreprise ? Elle est aussi rompue aux outils modernes de communication de masse : affiches, flyers, posters, inscription sur de nombreux sites touristiques…Une diversité qui fait la caractéristique de Luis. Selon lui, « Il n’y a pas d’activité phare dans cette ferme ». C’est peu dire : Luis est certes un agriculteur, mais sa ferme est aussi sa boutique. Il loue une salle au gouvernement, il organise des fêtes et concerts dans le jardin, il propose d’élever des plantes sur commande… « Je crois profondément qu’il faut être le plus diversifié possible, toucher à tout, savoir s’adapter… C’est vraiment important. »
De cette diversité dans ses activités, Luis a pu se construire une idée plus globale de la place de l’agriculture dans un pays en crise : « Il n’y a plus de travail au Portugal, mais l’agriculture peut être un espoir pour tous. Il faut moderniser ce secteur : être agriculteur, c’est être entrepreneur ! Il y a plus de 500 ans, le Portugal partait conquérir le monde.Aujourd’hui, la conquête doit se faire à l’intérieur de nos terres, tout en respectant la nature. Nous devons nous réapproprier notre pays. »
Yacine SAHNOUNE